L’ épi de blé : Jacob Wilhelm Grimm
Quand Dieu, au temps jadis, se promenait encore en Personne sur la terre,
le sol était beaucoup plus fertile que de nos jours et les épis portaient, non pas cinquante à soixante grains comme maintenant,
mais de quatre à cinq cents grains qui venaient sur toute la hauteur de la tige, du ras du sol à son sommet.
aussi longue avait-elle poussé, aussi long était l’épi.
Seulement les hommes sont ainsi faits que, dans l’abondance,
ils ne rendent plus grâce et ne reconnaissent plus la bénédiction que Dieu leur donne ;
ils sont indifférents et pleins d’insouciance, ingrats et irrespectueux.
Un jour, il y eut une femme qui longeait un champ de blé, quand son petit enfant,
qui gambadait à côté d’elle, tomba dans une flaque et salit sa blouse.
Sa mère, alors, arracha une pleine poignée de beaux épis pour en frotter les taches de boue.
Voyant cela, le Seigneur, qui passait justement par là, entra en courroux et déclara :
« A l’avenir, la paille ne portera plus d’épi du tout. les hommes ne sont pas dignes de profiter plus longtemps de ce présent céleste ! »
En entendant cette malédiction, l’assistance fut terrifiée et tomba à genoux,
suppliant le Seigneur de laisser quand même venir quelque chose sur la tige,
sinon pour eux-mêmes qui n’en étaient pas dignes, du moins pour les innocentes poules qui mourraient de faim, autrement.
Le Seigneur, qui avait déjà devant les yeux leur détresse future,
s’apitoya sur leur sort et exauça la prière.
Et c’est ainsi qu’il reste, au bout de la tige, un épi comme vous pouvez le voir encore aujourd’hui.